Fraîcheur au rucher
Même si l'effervescence de septembre a laissé place à un calme aussi apaisant que suspect, les visites au rucher se succèdent. On a parfois le sentiment de se promener dans une usine désaffectée. A cette différence près que les fantômes des ouvrières sont omniprésents. Le rucher étant exposé plein sud, le moindre rayon solaire titille quelques rares butineuses qui bravent le froid sec et se lancent dans un périple bien hasardeux. Malheureusement, certaines d'entre elles, rattrappées par la froidure mourront à quelques centimètres de l'entrée. Mais pourquoi sortir en plein mois de décembre, me direz-vous? Certes, "le travail à tout prix" est la devise du peuple des abeilles, mais la réalité est parfois plus pragmatique. Essayez de tenir plusieurs semaines dans une maison sans toilettes...
Une autre raison sanitaire les fait sortir de leur torpeur. La macabre évacuation des ainées mortes de vieillesse. Les nettoyeuses profitent d'un redoux éphémère pour les extraire au plus vite. Ceci, jamais bien loin de l'entrée afin d'éviter une dépense d'énergie si coûteuse en calories.
Un plateau posé devant la ruche afin de visualiser les abeilles mortes. Pas d'inquiétude pour cette ruche.
En haut à gauche des cadavres en décomposition. A droite une abeille morte qui vient d'être déposée. En bas, peut être la nettoyeuse qui a fait le travail.
Lorsque les frimas se font plus rudes, l'instinct grégaire prend le dessus. La vie semble suspendue. La grappe se forme tel un bouclier, ultime défense contre les agressions climatiques. Comme les manchots empereurs en terres adélies, cet agglomérat cellulaire est, malgré les apparences, en perpétuel mouvement. Les sentinelles placées au pourtour de cette sphère vivante se font happer par leurs sœurs, leur évitant ainsi une mort certaine. Elles sont alors remplacées par d'autres qui temporairement se sacrifient à leur tour.
Les muscles alaires vibrent et réchauffent. Les provisions de miel, indispensable carburant, prennent alors tout leur sens. Si elles viennent à manquer, il ne faut que quelques jours pour que cette structure parfaitement homogène se transforme en un charnier apicole.
Il faut donc soupeser pour les apiculteurs chevronnés ou peser pour les moins expérimentés. Je le fais tous les 15 jours afin de jauger la consommation de chaque colonie. Mais rien n'est simple... Ainsi, une de mes colonies pèse 30 kg en pesée arrière (on pèse l'arrière et on multiplie par 2) et 37 en pesée latérale (même principe que précédemment mais en soulevant les 2 côtés l'un après l'autre). Finalement, le seul moyen de se faire une idée précise est de regarder les réserves sur les cadres. Ce qui est à proscrire en plein hiver.
D'autre part, elles consomment de façon bien inégale. Une de mes ruchettes a d'ailleurs un appétit gargantuesque. Elle eut bien du mal à constituer ses réserves en septembre et continue aujourd'hui encore à s'alléger trop rapidement à mon goût. J'ai été obligé de lui poser dès le mois de décembre un morceau de candi (sucre en pâte).
Une petite vidéo pour illustrer tout ça...
Celle-ci est divisée en 5 parties :
- tout d'abord une nettoyeuse qui pose une abeille morte
- Ensuite une petite maladroite qui vient de rater la ruche. Elle a bien des difficultés pour reprendre son envol.
- la troisième a été plus maline. Etant en difficulté, elle fait une pause sur le toit de la ruche avant de reprendre son envol vers l'entrée.
- elle finit par se poser et rentrer à la maison.
- Enfin, une ruchette assez active suite à un radoucissement.
Pour finir, petite surprise en arrivant au rucher. C'est bien sympathique...
Je ne suis pas spécialiste, mais ça semble être un jeune chevreuil.